Dans le cadre de la semaine onusienne dédiée aux 17 Objectifs du Développement Durable, des débats et interventions d’expert·es ont permis d’identifier des solutions concrètes et durables au changement climatique. Dans ce cadre, Dona Bertarelli, sportive de haut niveau, philanthrope, et récemment nommée conseillère spéciale à l’économie bleue à la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement, est intervenue le 23 septembre 2020 lors d’une conférence virtuelle pour défendre l’objectif 14.
Objectif de Développement Durable 14 : l’océan au cœur de la planète bleue
Alors que l’océan recouvre les deux tiers de la planète bleue, qu’il fournit près de la moitié de l’oxygène que nous respirons et qu’il agit comme un puits de carbone en absorbant et stockant 30% des émissions de CO2 et 90% de la chaleur due aux activités humaines, nous n’imaginons pas à quel point il est malade. L’océan s’appauvrit en oxygène et devient de plus en plus acide, mettant ainsi en péril l’équilibre des écosystèmes marins, la chaine alimentaire et donc toute la biodiversité. Ces symptômes sont déjà largement visibles et sans la prise de conscience et les actions concrètes à mettre en œuvre tout de suite, la Terre deviendra progressivement inhabitable pour l’humanité.
Pour Dona Bertarelli, « … il est de plus en plus clair que l’ODD 14 - relatif aux océans - est la clé des objectifs concernant la pauvreté, la faim, la santé, l'emploi, l'égalité des sexes, le climat et bien d'autres choses encore. Mais il n'est pas facile de faire en sorte que l'océan occupe la place qui lui revient au cœur des programmes de développement durable et d'action en faveur du climat. »
Pour beaucoup d’entre nous, l’océan occupe une place privilégiée dans notre vie lors de la période estivale pour celles et ceux qui ont la chance de profiter du bord de mer. Pourtant l’océan est aussi au cœur de toute une économie mondiale.
Croissance économique et développement durable ne sont pas incompatibles
Il est courant et « facile » d’opposer croissance économique et durabilité. En effet, l’industrialisation et la forte croissance des pays développés ces cinquante dernières années (au détriment des plus petits pays notamment les petits états insulaires) ont accéléré les émissions de gaz à effet de serre et par conséquence les pollutions et le réchauffement climatique. Pourtant ces pays en développement ont besoin de développer leur économie pour survivre. Les connaissances actuelles, tant scientifiques qu’économiques nous permettent d’envisager un nouveau modèle de développement intégrant la durabilité et la résilience des océans. L’économie bleue vise à produire le moins de déchets possibles et à envisager le développement non pas comme destructeur de ressources mais comme régénérateur. Il est temps de valoriser la vie océanique et de financer sa protection en changeant de raisonnement. En s’appuyant sur les travaux de l’éminent économiste du Fonds monétaire international Ralph Chami, Dona Bertarelli explique comment la protection et la conservation des océans doivent être intégrés dans le modèle de croissance économique :
« Chaque année, une baleine bleue peut absorber autant de dioxyde de carbone (CO2) que 30 000 arbres, ce qui fait que la population totale de baleines vaut plus de 1 000 milliards de dollars. Le même principe d’évaluation peut être appliqué aux requins, ou aux récifs coralliens – qui représentent une valeur d’environ 36 milliards de dollars par an pour l’industrie du tourisme. Alors pourquoi la conservation de la biodiversité des océans n’est-elle pas une priorité politique et économique de premier plan ? »
Une des raisons réside sans doute dans le fait qu’aujourd’hui, l’humanité a tellement attendu pour agir que le mur à franchir parait inatteignable. C’est la raison pour laquelle il est important maintenant de se donner des objectifs concrets atteignables et c’est en partie le but des 17 Objectifs de Développement Durables décidés il y a 5 ans par les Nations Unies.
Se donner des objectifs atteignables
Dans son intervention à la Conférence des Nations Unies, Dona Bertarelli propose de prioriser les 3 objectifs suivants :
- Il est temps de respecter la directive 14.6 et de mettre un terme aux subventions néfastes à la pêche qui favorisent la surpêche ou contribuent à la pêche illégale.
- Aujourd'hui, seulement 5,3 % des océans sont effectivement protégés dans des zones marines protégées. Pourtant l’objectif 14.5 exige de protéger au moins 10 % des zones côtières et marines d'ici 2020.
- Enfin, la réalisation de l’objectif 14 dans son ensemble permettrait d'exploiter la valeur naturelle de l'océan dans le cadre d'une économie bleue dynamique et durable, fondée sur sa protection et non sur son exploitation, et qui profiterait à tous.
On constate aujourd’hui que si de nombreux états se sont engagés dans la poursuite des Objectifs de Développement Durable, leur mise en œuvre reste délicate soit par un manque de vision stratégique des états, soit par manque de financement ou par intérêts divergents des pays. Il faut bien garder en tête le temps long nécessaire à changer les choses : c’est en agissant dès maintenant que les résultats seront visibles dans plusieurs décennies. Mais c’est à ce prix que nous sauverons la planète bleue.
Dans son intervention Dona Bertarelli reste optimiste et conclue : "le tour du monde en 80 jours était autrefois de la science-fiction. Mon équipe de voile Spindrift racing et moi l'avons fait en 47 jours. Nous n’avons pas de planète en réserve, alors restaurer notre océan et la nature ne peut pas être juste un rêve. C'est une course dans laquelle nous devons nous engager - ensemble. »
Ci-dessous l'intervention de Dona Bertarelli lors de la Conférence des Nations Unies sur les Objectifs de Développement Durable : "Dive deeper into the blue economy with the fastest woman to have sailed around the world”